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Président de la commission médicale d’établissement au centre hospitalier de Mayotte (CHM), Thierry Pelourdeau tient à utiliser les mots justes : « Les urgences sont en situation critique. » Sans faire de surenchère ou minorer la situation. « C’est très dur pour les médecins, avec de grandes situations de stress », ajoute-t-il. En souffrance depuis près de deux ans, faute d’attirer des médecins, réticents à s’installer dans un département frappé par des violences récurrentes entre bandes rivales, une crise de l’eau, une épidémie de choléra, minées par des conflits internes entre des médecins et leur chefferie, les urgences de Mayotte ont subi de plein fouet la traditionnelle pénurie de praticiens durant l’été. « A cela se sont ajoutés les besoins pour les Jeux olympiques », souligne le docteur Pelourdeau.
Le 10 juin, déjà, une cinquantaine de médecins du CHM avaient manifesté à Mamoudzou contre un hôpital en plan blanc « qui s’effondre », en voulant « alerter la direction, la population, le ministère de la santé ». Avec un effectif théorique de trente-sept postes, les urgences fonctionnent actuellement avec trois équivalents temps plein chargés de gérer l’accueil, les box des malades, l’unité d’hospitalisation de courte durée, le déchocage (le traitement d’urgence de l’état de choc). « Les médecins qui sont là assurent le maximum pour éviter les catastrophes, et réalisent des tonnes d’heures », assure Christophe Laplace, chirurgien infantile et cogestionnaire, à titre provisoire, du service des urgences.
Pour pallier le manque de médecins urgentistes, des spécialistes – réanimateurs, pédiatres – « descendent » régulièrement dans le service. Il est également fait appel à des médecins généralistes du CHM. « On aboutit à ce que j’appelle des dingueries, avec des situations extrêmes liées aux problèmes de recrutement et au manque d’urgentistes », décrit Adrien Cussac, chef de service du centre médical de référence de Kahani, établissement dépendant du CHM. Ce que tout le monde à Mayotte appelle « un dispensaire ».
Le médecin cite le cas d’un carambolage survenu début mai à Combani, et ayant provoqué la mort d’un automobiliste et sept blessés. « Il n’y avait pas de médecin du SMUR pour cette intervention, explique le docteur Cussac. C’est un généraliste qui est parti sur place avec un infirmier du SMUR, qui, heureusement, est expérimenté. » Lui-même généraliste, il a été assigné par sa direction pour une garde de douze heures aux urgences. « Je ne suis pas là pour me plaindre, insiste le Dr Cussac. Ma bonne volonté ne peut remplacer la formation dédiée de quatre ans en médecine d’urgence. Je me suis retrouvé avec un médecin étranger faisant fonction d’interne face à cinquante patients en transmission pour une prise en charge. »
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